Le cauchemar des Premières Nations
Qu’avons nous fait à nos frères et nos soeurs des Premières Nations ? Qu’avons nous fait à ces peuples si richement pourvus en beauté, profondeur, spiritualité ?
«Suis-je le gardien de mon frère ?» a répondu Caïn à Dieu qui lui demandait où était Abel. Caïn venait tout juste d’assassiner Abel par pure jalousie. «Suis-je le gardien de mes frères autochtones ?» demandent en coeur les gouvernements canadiens et son peuple. À lire les différents rapports sur l’état de la santé mentale, physique et économique des Premières Nations, la réponse donnée à cette question est un scandaleux «NON» !
Un non comme celui que vient tout juste de dire le Canada aux Nations-Unies qui tentaient de le convaincre de signer la Déclaration des Nations-Unies sur les droits des peuples autochtones. Ce document stipule à l’article 24 que « (…) Les autochtones ont (…) le droit d’avoir accès sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé. Les peuples autochtones ont le droit, en toute égalité, de jouir du meilleur état possible de santé physique et mentale. Les États prennent les mesures nécessaires en vue d’assurer progressivement la complète réalisation de ce droit.»
Les quelques statistiques mentionnées dans l’article de notre rédacteur Marc Charron prouvent que la santé mentale des autochtones est littéralement ravagée. Citons-en une, celle du pourcentage d’autochtones qui ont consulté un spécialiste de la santé mentale au cours de l’année qui a précédé le sondage réalisé par l’Enquête régionale longitudinal 2002-2003 sur la santé des Premières Nations. Ce pourcentage est hallucinant : 17% ! Alors que nous savons que les services spécialisés en santé mentale sont déficients dans les réserves et qu’ils rejoignent mal les autochtones hors réserves !
Ce chiffre s’explique pourtant ! Le rapport intitulé Aspect humain de la santé mentale et de la maladie mentale publié par l’Agence de santé publique du Canada en 2006 reconnaît que l’état pitoyable des autochtones canadiens est dû en grande partie aux facteurs historiques et à l’acculturation. «Toute réflexion sur la santé mentale des Premières nations et des Inuits, écrivent les auteurs du rapport, doit tenir compte des facteurs historiques qui ont mené à la situation actuelle. Les changements découlant du contact avec la culture eurocanadienne ont eu de profondes répercussions sur ces collectivités, sur l’identité individuelle et collective de leurs membres ainsi que sur leur état de santé global.»
Les conditions économiques dignes du Tiers-Monde expliquent également le haut taux d’autochtones ayant consulté un spécialiste de la santé mentale. Dans certaines réserves la situation est elle telle que même l’eau n’est plus potable ou est à risque ! Le rapport annuel de 2005 du Commissaire à l’environnement et au développement durable pour le Bureau du vérificateur général a révélé que «malgré l’investissement de centaines de millions de dollars en fonds fédéraux, une proportion considérable des réseaux d’approvisionnement en eau potable dans les collectivités des Premières Nations continue de fournir de l’eau dont la qualité ou la salubrité est à risque. Bien que l’accès à l’eau potable se soit améliorée, la conception, la construction, le fonctionnement et l’entretient de bon nombre de réseaux d’approvisionnement en eau sont encore déficients.» Concrètement cela veut dire que dans certaines réserves l’eau peut rendre malade. C’est le cas des membres de la Première Nation d’Aamjiwnaang qui depuis 1993 s’interrogent sur la qualité de l’eau potable. Leurs propres études ont démontré que le taux de PCB, de nickel, de cadmium, d’arsenic, de zinc et de plomb était extrêmement élevé.
Ce fait, et de nombreux autres, démontrent que le Canada viole les droits et libertés des Premières Nations. À chaque jour, des autochtones subissent les répercussions de politiques et de pratiques qui sont indignes d’une démocratie en bonne santé économique. Rien ne peut justifier cette situation exécrable. L’abjecte non lancé à la face des Nations Unies par le Canada est de mauvais augure pour l’avenir des Premières Nations.
«Suis-je le gardien de mes frères ? »